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J'ai noté notre test provincial des compétences linguistiques en Ontario la semaine passée. La chef de notre salle était franco-ontarienne, et elle nous a raconté une blague que je n'ai pas pu saisir.

En voici la transcription :

Le téléphone sonne chez une Québécoise. C’est un anglophone qui appelle. Il demande : « Is your husband there? » Elle répond : « Non. » Il demande encore : « Is he gone? /ɪzigɔn/ » Elle répond : « Is he gone pas ! /izigɔnpɑ/ Il est parti ! »

Il est clair que la blague se base sur la prononciation, donc voici un enregistrement si ça aide.

Si quelqu'un peut l'éclairer, j'en serai reconnaissant. :)

Stéphane Gimenez
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Luke Sawczak
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  • Update: Tried this out on a 10yo whose mom is Québécoise. He instantly cracked up and then identified the two phrases being played on. The answer below is thus confirmed in the field. :) – Luke Sawczak Sep 14 '19 at 13:51

2 Answers2

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Is he gone?         /ɪzigɔn/ (pris pour "y'zigonne ?", c-à-d "il zigonne ?")
Il zigonne pas !   /izigɔnpɑ/

Zigonner est inconnu en France, mais la prononciation simplifiée des pronoms personnels y est courante : i pour il, a ou è pour elle, ch' pour je, t' pour tu et i ou z pour ils.

Source: www.dictionnaire-quebecois.com

Zigonner : Verbe propre au langage populaire québécois, on l’utilise dans les cas suivants : [1] pour signifier le fait de travailler inefficacement ; [2] pour indiquer le fait de peiner à l’accomplissement de quelque chose (ex : j’ai beau zigonner après cette foutue machine mais j’arrive pas à la réparer) ; [3] pour marquer l’acte d’un chien qui s'accroche à quelqu'un ou quelque chose pour simuler une copulation.

Voir aussi wiktionary et https://oreilletendue.com/2014/01/08/detresse-du-jour/ où l'on trouve une étymologie possible :

La suite logicielle Antidote propose l’étymologie suivante :

Emprunt au poitevin ou saintongeais zigzounàe, «scier maladroitement»; de l’onomatopée zik-zak, «bruit du va-et-vient d’une scie».

jlliagre
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En complément, voir aussi le Glossaire du parler français du Canada (1930, Société du parler français au Canada) :

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On écrit le mot au Québec depuis 1903 (employé plus anciennement à l'oral) et on y voit la même origine onomatopéique que zigouiller ; il s'est déjà employé pour tisonner (digonner, Normandie) et « mal jouer du violon ». (DHLF)

Aujourd'hui zigonner c'est soit perdre son temps ou travailler à des choses sans importance (voir Wiktionnaire ; peut-être aussi concrètement avec une serrure pour « chercher à pénétrer », DHLF) mais c'est vraiment la prononciation du i(l) devant le verbe conjugué (il zigonne) qui fait en sorte que c'est essentiellement identique à la prononciation de « is he gone ? » en anglais que l'interlocuteur interprète comme un propos en français d'où sa réponse « i(l) zigonne pas, il est parti » et la blague.

  • Est-ce que "Il est parti" peut s'abrèger/se prononcer comme/en "i(l)/y est (y'est?) parti", et si c'est le cas, est-ce possible que la blaque emploie/exige la version complète ("Il est parti") pour ne pas "dévoiler"/faire allusion à l'astuce derrière la blague? Thanks! – Papa Poule Apr 13 '19 at 17:30
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    @PapaPoule Oui, c'est noté/prononcé « y'é (parti) » (dans l'enregistrement on dit bien il est parti). Bien dans le sens où si quelqu'un n'a jamais entendu et ne reconnaît pas le verbe zigonner, il peut comprendre uniquement « is he gone pas » au lieu de « i(l) zigonne pas » et la blague reste incomprise. Mais selon moi ça dépend surtout de s'il a reconnu justement ce verbe-là et sa forme conjuguée. Je ne pense pas que le pronom il vende la mèche... ou je ne vois pas exactement ce que ça changerait... –  Apr 13 '19 at 21:04
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    @PapaPoule Comme par exemple enfant on me raconte la blague suivante « Qu'est-ce qu'une vache prend dans un bar ? »... « un p'tit coup »... ?? La personne parlait allemand, c'est « die kuh » (la vache)... je ne l'ai jamais comprise hahaha. –  Apr 13 '19 at 21:14