Préambule
On m’a toujours appris :
« On ne dit pas couper les cheveux à Jean, mais de Jean »,
... or dans le troisième commentaire de la réponse :
@cl-r Pourquoi dans mon dictionnaire (Hachette) c'est : couper les cheveux à qn? – Mohammad Sanei Jul 24 at 13:18
Lors de la consultation de mon dictionnaire favori je trouve « couper la gorge à quelqu’un » (dans le sens diviser avec un instrument tranchant), « Elle s’est fait couper les cheveux chez son coiffeur », « Couper quelque chose dans un discours », tombe ensuite sur « TRANS. IND. – FAM. Couper à ⇒ éviter : « couper à une corvée, y échapper » et lit d’autres acceptions du verbe.
La question est donc posée au lecteur de French Language ([pas] toujours bêta1) pour obtenir des éclaircissements.
Peu après avoir posé la question je trouve une réponse dans le dictionnaire de l'Académie française,, elle n'était pas mentionnée à première vue dans les recherches antérieures et remet à sa place ce qui a toujours été pris pour une ‘vérité véritablement vraie, valable, véridique, vérifiée’2 :
- Couper qqch à qqn est rangé dans le paragraphe figuratif et familier :
Les expressions familières n'entraient pas dans les enseignements de l'école (qui à l’époque n’imaginait même pas que la grammaire puisse devenir moderne et jargonnante), elles devaient (et donc elles doivent toujours) être corrigées.
Cette réponse est donc postée, les commentaires ont aidés à son amélioration puis ont été supprimés,quand soudain une aguichante barre chocolatée3 de haute valeur vient encore tout chambouler. Pour un non grammairien uniquement francophone le coup est rude, mais nous en reparlerons à la fin, donc voici la réponse académique (certain la qualifie de sémantique) reformulée et amendée :
Usage des prépositions :
Expression figurative ou familière : a, versus, Expression de la réalité : de
Dictionnaire de l’Académie française :
Expr. fig. et fam. :
- Couper les ailes à quelqu'un.
Mais « On a coupé la tête à Louis XVI » bien que cela ne soit pas figuratif devient donc familier, car il est plus facile de prononcer la tête à toto, que la tête de toto, car aucun e ne peut être élidé ce qui oblige à prononcer une syllabe de plus.
Or lorsque l'on raccourcit la chevelure de quelqu'un on en retranche, pour de vrai, une partie :
3. Ôter, retrancher une partie d'un ensemble ; séparer :
- Couper un pan de montagne pour construire une route ; (pour un objet).
- La guerre l'avait durant quatre ans coupé de sa famille ; (pour un humain).
En plus la forme pronominale utilise de, (qu'il s'agisse de personne ou d'objet) ce qui accoutume l'oreille au de !
Pron.
- Se couper de quelqu'un, le perdre de vue, cesser toute relation avec lui.
- Se couper de quelque chose, perdre le contact avec elle.
Une recherche sur CNRTL, fournit l’étymologie :
XIe siècle. Dérivé de coup. Au sens propre « diviser d'un coup », d'où « couper ».
Il utilise de, parfois dans : « Couper un passage dans un livre » (j'aurais tendance à lire : « il a physiquement découpé les pages du livre où se trouvait le passage abhorré » et à dire : « Il a coupé un passage du livre ») :
☆3. Ôter, retrancher une partie d'un ensemble ; séparer. Couper un pan de montagne pour construire une route. (Reprise de la citation de l’Académie française)
En revanche il supprime la préposition dans une expression figurative :
Couper les angles, les arrondir ; fig., trouver des compromis.
Il rattache aussi à aux locutions familières :
☆3. Loc. fam. Couper à, échapper à quelque chose de déplaisant, l'éviter. Il a l'art de couper à toutes les corvées. Vous ne couperez pas à une punition.
Dans les expressions populaires, les prépositions ne sont pas les mêmes, pourtant le de revient une fois :
Ne pas y couper de. : Vous n'y couperez pas d'une amende, d'une contravention.
Couper dans, se laisser prendre, se laisser tromper par quelque chose, y croire naïvement. Il coupe dans tous les boniments.
Une recherche sur Porter, suggérée par un commentaire :
PORTER § A 2. Tenir, avoir sur soi : ... Porter le deuil de quelqu'un, le nom de Tibert...
Je n'ai pas trouvé d’exemple avec à dans cet alinéa, et on retrouve dans le figuratif :
$ B 2. figuratif : Porter à croire, ...
Commentaire sur la question :
Ce ne me semble pas être une question de grammaire, mais de réalité ou non, avec aussi des exceptions (dans, les) qui tendent à montrer que l'emploi des prépositions est hérité de l'usage plus que d'un concept grammatical :
- 1°) Si cela existe on utilise de,
Si l'on utilise a on use d’un langage familier : 'grammaire' orale, grammaire des sons (pardon des phonèmes), qui associe qqch à qqn, après tout à est l'homonyme de a.
Quelquefois, “pour être sûr et certain” que le lien existe (cas du mariage par exemple) a(vec) se surajoute : et on marie qqn avec qqn, et non pas qqn à qqn comme il est d'usage.
- 2°) Si cela appartient à l'imagination on utilise à, si l'on emploie de les tournures usuelles sont invalides : On ne peut pas « couper les ailes de quelqu’un » car cela ne peut s’appliquer à l’humain, qui n’en a pas, ni aux anges que l’on ne voit pas (ce serait peut-être envisageable de les couper sur une image les représentant).
Ici la 'grammaire' orale n'est pas concernée, de étant déjà réservé aux nobles avec qui l'ont ne doit pas être familier, alors on s'en méfie !
Commentaire sur le bounty :
Je rends hommage à Divulgâchâmes d’avoir été interpellé par mes propres interrogations.
Dans cette rencontre nous sommes complémentaires :
– J’essaie de remonter aux sources, tant étymologiques que celles du langage, là où le cerveau prépare et porte à notre conscience les vibrations sonores en préparation avant même qu’elles ne franchissent définitivement les cordes vocales ; c’est un comportement de francophone sans grammaire (Peut-être suis-je un avatar de M. Jourdain4), qui s’intéresse au souffle du verbe dans les arts vivants, aux richesses multiples de la francophonie.
– Sur cette page, Divulgâchâmes, essaie et investit sans relâche pour qu’on l’aide à trouver des règles et des lois, pour faire entrer des morceaux de phrases dans des cases après les avoir soigneusement identifiés, étiquetés (une forme d’industrialisation du vivant) en recherchant et compilant les écrits, le passé, tous ces mondes morts qui ne revivent que pendant le temps où l’on pense à eux ; c’est un univers de chasseurs où la sérendipité est un cadeau du ciel.
Et si la trouvaille de cette chasse était d’accepter les limites formelles de la grammaire au-delà desquelles il n’y a pas d’explications mentales, où les conjectures se perdent dans la pluralité des définitions aux apparentes contradictions, qu’il y a des zones du français où l’intuition et la créativité bousculent joyeusement les certitudes pour amener un peu de rêve, de poésie, une indécision, du glamour, un sourire… puis une évolution du langage lorsque tout le monde l’entend ainsi.
… et parmi les nombreuses questions de la carotte chocolatée, la seule à laquelle je peux essayer répondre :
la grammaire rejoint-elle la sémantique ?
Non ET Oui :
Non
Dans l’apprentissage d’une langue, on se heurte à la réalité, au sensible : bambins, les mots ont le sens du concret qui nous entoure, et puis ils s’organisent et par la puissance statisticienne de notre cerveau on conclut que « les chevals ils ont courri beaucoup vite », alors la Grammaire arrive… et on tord le bras aux règles fondamentales, on introduit exceptions, complications, on pinaille… la suite est singulière pour chacun, mais le résultat communément partagé, et bon nombre d’allergie en résulte.
La grammaire ne peut donc pas rejoindre la sémantique, puisque dès le départ elle est ne lui est pas jointe : que l’on soit animal ou humain, chaque son a un sens, exprime quelque chose de ressenti, voire une émotion, un essai de communication, ensuite, le grammairien, comptable tatillon, codifie, impute, regroupe, trie, ordonne, totalise, ergote, redresse, rapproche, vérifie, valide, règle, tranche, certifie, impose, déclare… ♭mol : au lieu de chiffrer au centième d’unité les valeurs financières qui dessèche le cœur du comptable5, le grammairien utilise des contraintes réglementaires semblables pour faire son bilan, son inventaire des mots et de leur agencement que lui seul définit... mais alors que la comptabilité vit du zéro et du un, au vrai ou faux de notre syntacticien s'ajoute autre chose d'indéfinissable, peut-être le doute, l'inconnu, le silence, le troisième infini de la complexité ? Il surchauffe ses neurones pour réduire les expressions de la Vie et les faire entrer dans son monde verbal, qui devient verbeux… hors duquel point de salut ! Il n’y a pas de jeu, de ce jeu que l’on laisse entre deux pièces mobiles pour qu’elles puissent se mouvoir aisément l’une par rapport à l’autre.
La grammaire vient mettre un peu d’ordre pour essayer d’universaliser les rapports humains, c’est donc une contrainte qui s’appuie sur une réalité, elle est seconde par rapport au sens, et elle le rend plus aisé à transmettre.
Quand elle prend le masque des automates correcteurs d'orthographe... comme je l'accueille avec soulagement !
ET
Non elle ne peut pas se ‘joindre à nouveau’ à la sémantique, mais elle peut la rejoindre en la rattrapant :
Oui
– Dis donc phonème A, j’ai plusieurs façons de t’écrire, avec deux accents possibles, un h avant ou (plusieurs) h après, en majuscule ou minuscule… tu dois mettre à après le verbe couper parce que...
– Que nenni dame Grammaire, laissez tomber vos certitudes, « la Justice est la pire façon de gouverner les hommes (Lao Tseu) » et leur langage, acceptez que dans la même forme, selon l’intention, l’intonation, le contexte, à soit valable ou pas, qu’il ait un double sens ou qu’il handicape la compréhension : Ah Ah Ah : vous le lisez narquois, vindicatif, dérisoire, sur le même ton, ironique, exclamatif, admiratif… ? Il vous manque (ou plutôt vous les refusez) les vibrations de la vie pour trancher ; à bout de souffle, allez toquer chez de sages académiciens qui conservent les cas d’usage, et, vous rejoindrez la sémantique pour valider vos hypothèses… ce qui ne vous empêchera de mettre en jargon, à vous seul compréhensible, ce que vous pourrez qualifier verbeusement.
Sur ce, dame Grammaire, ne retournez pas au plus haut de votre donjon, vous êtes toujours utile, quoique souvent incompréhensible au commun des francophones.
Il y a donc une part indécidable dans la grammaire, qui n’est qu’une illusion d’ordre : ou elle vit avec les mots et évolue avec eux, ou elle s’enferme dans un conservatoire qui leur est délétère, confirmant une loi de l'entropie : tout système qui tend vers l'immobilisme tend vers la mort.
Pendant ces mouvements, ces évolutions, il y a un espace puis des héritages où elle ne peut rien décider : j’ai toujours entendu dire « Ce sont eux », jusqu’à ce que Georges Marchais impose à tout le monde « C’est eux » aujourd’hui accepté, les deux sont entièrement corrects : soit eux désigne un ensemble seul (composé de personnes), soit ce sont des personnes regroupées, que peut donc faire la grammaire ici ? Peut-être des périphrases, ce sont elles (c’est elles ??) qui croqueront le bounty.
Codicille6 pour l’héritage du bounty
À moins que ce ne soit déjà l’obole pour le Cerbère qui accueillera bientôt ces mots qui partiront vite vers l’oubli, c’est à la déesse Francophonie, jeune déesse du mont Olympe, avatar d’une parèdre de l’ancestral *mont Meru* que je dédie cette récompense.
En effet, le livre que Divulgâchâmes interroge (et de ce fait qui l’interroge en retour) peut être lu par un grammairien pour répondre à des questions intellectuelles de haut niveau, ou par un néophyte pour les exemples.
C’est donc l’élégance du geste de Divulgâchâmes qui offre une lecture du français sous des angles différents.
C’est ainsi que les langues s’apprennent : des citations, des tournures, des exemples que l’on mémorise, que l’on rapproche, que l’on relie à ceux de sa langue maternelle, et puis que l’on peut approfondir en en comprenant l’architecture syntaxique, alors on peut affiner la grammaire… ou pas ; dans le cas de la question originelle de cette page on choisit sa réponse en fonction de ce que l’on veut exprimer.
Les règles ne sont pas des lois, puisqu’on les prouve par leur exceptions.
S'il y a une loi, peut-elle être autre que :
- L’utilisation des prépositions est soumise à l’usage.
- Lorsque le choix est multiple, l’intention de l’auteur décide.
Si mes maîtres et maîtresses d’école, disciples de ceux de la IIIe République m’ont inculqué quelques notions de français, c’est qu’ils devaient sans doute savoir jouer sur ces deux tableaux et contrôler l’un par l’autre, et surtout s’assurer de la correction des termes employés tant du côté grammaire que du côté des dictionnaires, pour définir la correction des usages.
En pratique beaucoup connaissent les exemples et les usages, ont un peu lu, bien peu connaissent le jargon des grammairiens, et je suis dans les rangs de ces derniers.
Changer de point de vue n’est pas changer de siège au cinéma, c’est tantôt regarder et analyser des images tantôt observer comment la lumière et les Ténèbres en mouvement écrivent ; qui peut dire que l’un est préférable à l’autre ? Bienvenue en Francophonie.
Post Scriptum Codicillaire :
À l’expression Québéco-européenne ultra majoritaire de ce site, qu’il serait bon d’accueillir les francophones d’Afrique, des Océans et de milles autres endroits riches d'usages et d’expressions savoureuses pour appeler ce site French Language & Francophonie, ce ne serait pas tautologique : on étudie une langue à l’école & on la vit ‘plongé’ dedans quel que soit la longitude et la latitude ; là encore, deux points de vue qui au fond n’en font qu’un pour celles et ceux qui veulent la découvrir y trouver des points de repère complémentaires... Mais cela va être peut-être être discuté sur FE_meta
Pour les non francophones :
A - Pour accéder à la recherche de mot
. Bouton Dictionnaire sans menu déroulant
. Menu principal
. Lancer une recherche dans le dictionnaire
. Première case : couper
. et accéder au paragraphe (4)COUPER
1 – bêta est la deuxième lettre de l’alphabet grec – une notation mathématique ou technique – une phase d’avancement de projet – mais aussi : une personne bête, niaise, stupide.
2 – Exemple de pléonasmes multiples à ne mettre qu’entre guillemets à l’écrit ; pourrait-on alors parler de pléonasmes tautologiques, ou de pléonasme de puissance tautologique ? Ou l’inverse tautologies pléonastissime ? Ouvrir une question sur FLβ est-il nécessaire ? Grammaticalement nuls, peuvent-ils être entendus comme une forme (désuète, incisive, obsolète, nécessaire… ?) d’humour (figuratif, familier, réel, objectif…) ? De poésie 'Oulipesque' ? Qui sait ?
3 – ‘Bounty’ est devenu le nom commercial d’une confiserie… pas vraiment diététique.
4 – Personnage de Molière qui découvre qu’il s’exprimait en prose sans le savoir.
5 - La phrase exacte entendue de la bouche d’un expert comptable. : « La comptabilité dessèche les cœurs. »
6 – Se prononce [kɔdisil].